16 ans France 2022 – 94min.
Critique du film
Quand l’amour se heurte aux a priori
Nouveau film de Philippe Lioret autour des conflits familiaux, cette tragédie romantique est portée par deux jeunes comédiens dont le talent éclipse le reste de la distribution. Dommage que 16 ans propose trop peu de variations autour de «Roméo et Juliette», favorisant une accumulation de stéréotypes sur les personnes musulmanes en France.
Tout opposerait Léo (Teïlo Azaïs) de Nora (Sabrina Levoye) s’ils n’étaient pas aussi jeunes, fougueux et amoureux. La jeune femme se bat pour poursuivre ses études tandis que lui ne connaît que l’insouciance. Seulement leurs familles vrillent lorsque Franck (Jean-Pierre Lorit), père de Léo, renvoie Tarek (Nassim Lyes), grand frère de Nora, de l’hypermarché où il travaille suite à une accusation de vol.
Au détour d’un couloir du lycée, un regard échangé que capte gracieusement Philippe Lioret, puis Nora et Léo s’apprivoisent envers et contre toustes. À 16 ans, l’amour leur vient facilement et leurs différences culturelles et de classe ne comptent plus pour un temps. Au-delà de l’enchaînement de coïncidences romanesques qui jalonnent leur histoire, les obstacles à leur couple sont alors bien plus externes qu’internes, leurs sentiments n’étant d’ailleurs jamais explorés. En effet, le réalisateur délaisse souvent leur romance pour opposer les points de vue et les motivations de leurs deux familles suite au renvoi de Tarek, démontrant par exemple que même le père de Léo, un directeur blanc se croyant intègre, est susceptible de déchaîner la même brutalité que celle qu’il condamnait.
La volonté de dénoncer la façon dont les préjugés mènent inévitablement à une violence, tant physique que sociale, est noble. Seulement Philippe Lioret finit par donner à son récit des tournures caricaturales, insultantes lorsqu’il tente d’extrapoler sur cette opposition fictionnelle pour représenter les clivages entre une partie de la France et les personnes arabo-musulmanes. Car en représentant de jeunes hommes noirs et arabes saccager un supermarché, dealer et frapper leurs sœurs, soit abandonner leur morale dès lors qu’ils vont au-delà de la résistance à leurs oppressions, le réalisateur leur refuse la nuance.
Avec sa romance attendue, mais agréable à suivre grâce au rythme soutenu et au jeu de Teïlo Azaïs et Sabrina Levoye, deux belles découvertes crédibles malgré leurs dialogues d’un autre âge, 16 ans aurait pu moderniser le récit des amants maudits s’il n’avait pas tant versé dans les mêmes clichés qu’il prétend dénoncer.
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