Ferrari Chine, Italie, Royaume-Uni, Etats-Unis 2023 – 130min.

Critique du film

Retour en piste gagnant pour Michael Mann

Critique du film: Damien Brodard

De retour au cinéma après une dizaine d’années d’absence, le réalisateur Michael Mann présente enfin à la Mostra de Venise son projet de longue date relatant l’été 1957 d’Enzo Ferrari, le célèbre concepteur automobile.

Enzo Ferrari (Adam Driver) est menacé par la faillite de son entreprise alors qu’il doit gérer sa vie de couple chaotique. Entre les querelles fréquentes avec son épouse Laura (Penélope Cruz) et les visites ponctuelles à son amante Lina Lardi (Shailene Woodley), Ferrari tente de faire perdurer son empire en faisant participer son équipe à la Mille Miglia.

Le réalisateur Michael Mann n’était pas revenu dans les salles obscures depuis l’accueil glacial de son thriller «Hacker» (2015). En revenant à 80 ans avec un biopic mêlant intrigue de couple, enjeux industriels et courses automobile, ce dernier rappelle avec panache son statut d’artiste talentueux, sans toutefois atteindre le niveau de ses grandes œuvres. Outre quelques belles idées visuelles, comme l’utilisation de travellings compensés reflétant la vitesse, la mise en scène de Mann peine malheureusement à décoller, bien que son classicisme maîtrisé ne soit en aucun cas rédhibitoire.

C’est en revanche plutôt du côté du montage que le film se distingue. Grâce à la mise en relation des problèmes personnels de Ferrari avec des enjeux à l’échelle industrielle, le découpage insuffle une amplitude opportune aux choix ainsi qu’au parcours du protagoniste. Cela va sans dire, le montage savamment étudié injecte également une bonne dose d’adrénaline lors des courses qui, sous le grondement fracassant des moteurs et le crissement des pneus, en deviennent furieusement impressionnantes.

Qui dit biopic, dit bien souvent des interprétations devant paraître sensationnelles et mémorables à tout prix. Ici, exit les accents exagérés et les prestations grandiloquentes de «House of Gucci» (2021). Dans le rôle-titre, Adam Driver livre une performance solide et bien plus sobre qu’à l’accoutumée pour incarner cet ex-pilote implacable et stoïque – peut-être même au point de lasser. L’acteur américain peut toutefois compter sur la toujours impeccable Penélope Cruz pour lui donner la réplique. Pétrie d’une énergie et d’un répondant pugnace, cette dernière ne laisse cependant que peu de place à Shailene Woodley pour briller dans un rôle trop en retrait pour être véritablement notable.

Au fond, le long métrage est parsemé de petits points d’ombres qui, une fois réunis, en viennent à porter préjudice à ce Ferrari. On peut citer les effets numériques plutôt ratés bien que peu nombreux, la représentation étonnamment risible de la plupart des accidents ou encore l’intrigue qui peine parfois à captiver malgré une écriture réussie dans l’ensemble. Après tant d’années loin des salles obscures, on espérait un retour en piste tonitruant : ce n’est pas le cas, mais au vu de ses qualités indéniables, ce douzième film de Mann mérite clairement le coup d’œil.

(Mostra de Venise 2023)

29.11.2023

3.5

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Commentaires

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CineFiliK

il y a 9 mois

“The Driver”

En 1947, dans un pays ruiné par la guerre, Enzo Ferrari et sa femme Laura créent à partir de rien une industrie automobile florissante. Mais une décennie plus tard, les affaires sont au plus mal. Il faut à tout prix redorer le blason familial en remportant la course des Mille Miglia.

Il a le chic Adam Driver, qui porte en l’occurrence un patronyme approprié, pour incarner des entrepreneurs emblématiques de la péninsule tricolore. Après avoir endossé les costumes bien ternes de Maurizio Gucci, il gagne en charisme derrière les lunettes noires de l’homme qui parle à l’oreille du cheval cabré. Proche du « padrino », le voilà commandant en chef de la « Scuderia », faisant chanter son accent anglais comme le reste de la distribution qui n’a rien d’italien. Autre point commun entre les deux personnages, avoir affaire à une épouse prête à l’éliminer. Dans le rôle, Penélope Cruz exagère ici le trait de la prima donna éplorée. Elle tire dès le début sur son partenaire de mari qui dort et se réveille à l’insu de son plein gré dans d’autres bras. Ainsi, Michael Mann traite sur un même plan et sans totalement convaincre l’intime du « Commendatore » et sa vie publique. Figure impitoyable et d’un cynisme certain, le constructeur est néanmoins ébranlé, écartelé entre l’amour et la mort. La grande faucheuse n’a guère épargné le clan, emportant avec elle un frère sur le champ de bataille, un fils à l’hôpital, et des amis au volant de ces tombeaux ouverts. Si l’on a parfois l’impression d’avoir face à nous des petits garçons rivalisant avec leurs voitures pour prouver qu’ils ont la plus… rapide, l’on oublie trop souvent que le jeu a fait couler un sang aussi rouge que celui de la marque. Les accidents se multiplient sur les routes et les circuits. De quoi transformer le cuir d’Enzo Ferrari, en véritable carrosserie.

(6/10)Voir plus

Dernière modification il y a 9 mois


Loic_al

il y a 10 mois

Vraiment très décevant, film focalisé sur une petite partie de la vie d’Enzo. On passe plus de temps à suivre la liaison entre Enzo, sa femme et sa maîtresse qu’à s’intéresser aux voitures. Ferrari c’est la passion automobile et elle n’y est clairement pas dans ce film.
De plus les effets spéciaux sont vraiment mauvais pour un film de 2023.Voir plus


vincenzobino

il y a 10 mois

Le pigeon et le vautour
1957: Enzo Ferrari est en pleine crise : entre son entreprise éponyme qu’un prêt pourrait couler, son épouse Laura découvrant sa relation extra-conjuguai avec Lina, d’où naitra un fils Piero censé remplacer leur fils mort accidentellement avec son oncle 5 ans plus tôt, et la concurrence de Maserati, il mise tout sur une course à -travers l’Italie pour redresser la barre tel un « Commandatore ».
Le voici cet attendu biopic sur l’une des figures italiennes du XXÈME siècle. Où l’on attendait un mix Grand Prix-le Parrain (comme cité par un journal), on se retrouve face à une forte fable réelle.
Le premier plan historique bref, nous nous retrouvons en pleine séance de crise existentielle et de survie. Où l’on croit connaître un véritable parrain, on découvre un homme imparfait croyant pouvoir gérer ses voitures et pilotes, mais ayant beaucoup de mal à piloter ses relations avec les femmes.
L’une d’elle ainsi que des journalistes vont constituer un véritable vautour et faire passer notre Enzo pour un vrai pigeon. Sauf que le cœur peut faire mauvaise fortune et être bon.
Plusieurs morales de la Fontaine s’avèrent réelles pour notre dirigeant et cette illustration du non-contrôle de sa vie est saisissante.
Les amateurs de courses automobiles sont peut-être un peu plus laissés de côté mais deux séquences vont les contenter, un peu peu et mon unique regret serait peut-être que j’aurais préféré une durée plus conséquente pour équilibrer un peu plus.
Car niveau interprétation (Cruz et Driver particulièrement), photographie et direction artistique, rien n’est à jeter sauf peut-être le final un peu brut contradictoire à l’habitude du réalisateur de Heat ou Révélations.
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