Ma vie, ma gueule France 2024 – 99min.
Critique du film
Agnès Jaoui formidable dans une comédie bien dramatique
Un peu plus d’un an après la disparition de la réalisatrice Sophie Fillières, «Ma vie, ma gueule» débarque sur les écrans après avoir fait l’ouverture de la Quinzaine des Cinéastes au dernier Festival de Cannes. Une comédie dramatique poignante, aux rires régulièrement supplantés par l’émotion.
La cinquantaine, Barberie (Agnès Jaoui) a de plus en plus de mal à s’accepter. De son travail à la maison, elle hante sa propre vie, l’esprit embué par un gros nuage noir. Une situation que son entourage ne réussit pas à gérer. Au fil des rencontres et des changements, parviendra-t-elle à sortir la tête de l’eau?
«Ma vie, ma gueule» est le film posthume de la regrettée Sophie Fillières, disparue juste après le tournage. Pour mener à bien le projet, ses enfants et ses collaborateur·ices s’associent et nous offrent aujourd'hui le produit final. Si les quelques instants comiques font gentiment sourire, ce sont surtout les moments plus pesants, liés à la thématique même de l’œuvre, qui marquent les esprits.
La dépression touche n’importe qui, sans regard pour le genre, l’âge ou l’origine sociale. En 2023, le site Santé Public France mettait ainsi en avant une étude de 2021 qui indiquait que 12,5% des personnes âgées de 18-85 ans auraient vécu un épisode dépressif caractérisé (EDC) au cours des 12 mois précédant. Et perdu dans l’absurdité du quotidien, Barberie semble, doucement, s’effacer.
Le sujet est lourd, et le cinéma français a déjà tenté auparavant de l’aborder du point de vue de la comédie («Tout le monde aime Jeanne» en 2022 de Céline Devaux). Également scénariste, Sophie Fillières donne naissance à des dialogues occasionnellement incohérents, qui démontrent les troubles éprouvés par sa protagoniste. Heureusement, sa plume y glisse régulièrement de belles phrases, de bons mots, qui enfantent nombre de sourires sincères. Les rires, eux, se font rares.
Si certaines situations s’étirent au point de mettre à mal la patience du public, la simple présence de la merveilleuse Agnès Jaoui pardonne les petites contrariétés. Présente dans quasiment toutes les scènes, d’un bout à l’autre du film, l’actrice offre une fabuleuse performance et donne admirablement la réplique aux nombreux seconds rôles: un plaisir.
Moins comédie que drame, «Ma vie, ma gueule» reste indissociable de la tragédie de sa conception. Il est difficile de le regarder sans voir en Barberie le reflet de sa réalisatrice Sophie Fillières. Une œuvre testamentaire imposante qui, malgré petits nombreux défauts, marque.
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