Under The Silver Lake Etats-Unis 2018 – 140min.

Critique du film

Un polar brumeux halluciné et hallucinant

Alexandre Janowiak
Critique du film: Alexandre Janowiak

Under the Silver Lake raconte l'histoire de Sam, un jeune homme célibataire, au chômage et rêvant de grandeur. Un jour, il tombe subitement sous le charme d'une voisine mystérieuse. Mais du jour au lendemain, elle disparaît brusquement. Sam va alors se lancer à sa recherche dans un Los Angeles complotiste et insaisissable...

Dès son ouverture sur ce message « Attention au tueur de chien », le long-métrage de David Robert Mitchell nous inscrit dans une énigme qui demandera des réponses. La première d'une longue liste de secrets et de cachotteries que le personnage principal va découvrir au fur et à mesure de sa quête. En cela, Under the Silver Lake est des plus passionnants. Après une brève présentation des acteurs principaux du récit, le film va rapidement nous transporter dans une quête de plus de deux heures aux côtés de son héros Sam, sans jamais le quitter.

Sam (Andrew Garfield) est la représentation parfaite du spectateur découvrant, au fil des minutes, toutes les machinations qui l’entourent dans ce Los Angeles frivole, inquiétant et sibyllin. Le moyen de nous faire voyager à tous les coins de la Cité des Anges, de ses plages de sable fin à son observatoire, de la célèbre colline hollywoodienne aux cimetières de stars en passant par son réservoir. Des déambulations incessantes, de jour comme de nuit, proposant un jeu de piste ultra-référencé où les hommages à Alfred Hitchcock (Vertigo, Fenêtre sur Cour, la musique aux airs Hermannien), David Lynch et son Mulholland Drive, Paul Thomas Anderson et Thomas Pynchon (Inherent Vice) ou encore Robert Altman (Le Privé), se multiplient.

Des références pops, colorées et post-modernes dont David Robert Mitchell n'use pas comme d’un simple gadget (même si parfois il frôle la surenchère). Au contraire, il s'en sert pour jouer des codes du film noir, de l’horreur et même du fantastique. Il fait alors d’Under the Silver Lake, une œuvre profondément marquante et unique. Avec son trip halluciné dans les sombres ruelles de Los Angeles, le film offre un scénario imprévisible, parfois proche du mindfuck et pointe du doigt la folie parano que peut engendrer la pop-culture.

Certes, sur 2h20 de pérégrinations, Under the Silver Lake manquera parfois de rythme. Le grand final pourra d’ailleurs en décevoir plus d’un, choisissant de ne pas tout expliquer et de laisser de multiples mystères énoncés sans réponse. Cependant, l’œuvre de l’américain foisonne tellement d’idées visuelles et de mouvements de caméra vertigineux, développe une telle multiplicité de thématiques si impressionnantes et fourmille de tant de détails, qu’elle marquera assurément chacun des spectateurs. Le film profite aussi d'un Andrew Garfield exceptionnel, sans doute dans son meilleur rôle au cinéma jusqu'ici.

Résumé : Mêlant les codes du film noir, de l'horreur et du fantastique, sorte d'hommage au cinéma de Hitchcock, Lynch et Altman, Under the Silver Lake est un OVNI imprévisible. Une enquête ultra-référencée, colorée, perturbante et parfois proche du mindfuck dans les bas-fonds d’un Los Angeles brumeux et paranoïaque. Porté par un Andrew Garfield absolument génial, le film de David Robert Mitchell demandera sans doute de multiples visionnages pour en saisir toutes les subtilités. Le signe d'une oeuvre d'une folle richesse.

20.02.2024

4

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Commentaires

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CineFiliK

il y a 6 ans

“Plongée en eaux troubles”

Sam n’est pas insensible au charme de sa nouvelle voisine, aussi blonde que Marilyne. Il détaille son corps aux jumelles depuis son balcon. Un biscuit pour amadouer son bichon et le voilà invité à passer la soirée chez elle. Il souhaite la revoir. Mais le lendemain, l’appartement est vide. Sarah a disparu.

Se persuadant qu’il lui est arrivé quelque chose de grave, Sam, geek et sans activité connue, part immédiatement à sa recherche, remarquant dans tout ce qui l’entoure des symboles cachés. Cette chasse au trésor plonge le jeune homme, qui ne fume pas que des cigarettes, dans un purgatoire labyrinthique, glissant du fantasme sexuel au cauchemar paranoïaque.

Grâce à David Robert Mitchell, on s’évade depuis une fenêtre sur cour pour emprunter la route de Mulholland Drive et rouler jusqu’aux étoiles d’Hollywood Boulevard. Son hommage délirant à Los Angeles, son cinéma et ses fantômes, envoûte par son mélange d’autodérision et d’inquiétant. On sourit beaucoup, frémit aussi et s’interroge sur cette génération désenchantée, qui comble l’inanité de son quotidien avec l’illusion pop du rêve américain, des légendes urbaines et autres théories du complot. « Pourquoi perdre du temps à chercher un sens, là où il n’y en a pas ? », lui demande-t-on. Le besoin peut-être de croire encore à quelque chose.

7.5/10Voir plus

Dernière modification il y a 6 ans


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