Inna de Yard France 2019 – 99min.

Critique du film

Les légendes jamaïcaines retraversent leur passé tragique et glorieux

Sven Papaux
Critique du film: Sven Papaux

Un disque pour retraverser un passé, une existence rythmée et hantée par le reggae et le message que transmet ce style. Inna de Yard, c’est capter la musique dans son état sauvage, comprendre les origines d’une Jamaïque liée à jamais à cet art si subtil.

Sur les hauteurs de Kingston, où les collines verdoyantes contrastent avec l’état presque insalubre de la capitale jamaïcaine, des icônes du reggae se retrouvent pour confectionner un album. Un documentaire qui retrace la vie d’artistes légendaires. Inna de Yard est avant tout une expérience humaine, le mouvement rastafari conté par ses plus fervents défenseurs.

Winston McAnnuf, Kiddus I, Cedric Myton, Ken Boothe ; des pierres angulaires, des personnalités du milieu reggae. Des premières notes, un morceau comme « Row, Fisherman, Row », avec la voix aigüe de Myton, surnommé le…pêcheur. La préparation d’un disque, d’une future tournée qui les emmènera partout, trente ans après leurs heures de gloire. Un air nostalgique, une réminiscence d’un passé glorieux, compliqué, intraitable parfois. Le reggae raconte la réalité de ces artistes. Le film, lui, raconte les origines du genre, l’évolution dans les années 60, mais également le message prôné et les oppressions vécues dans une Jamaïque marquée par la criminalité.

L’enregistrement de l’album, à travers la caméra de Peter Webber, démontre cette passion, cette énergie qui ne faiblit pas avec le temps. Un mélange, une mixture de musique et d’humanité. Les années ont passé, l’alchimie entre eux est la même. Inna de Yard - dans le jardin en patois jamaïcain - exprime l’essence du reggae, la beauté des rythmes et le sous-texte dramatique malgré les penchants festifs du style musical. Un message d’honnêteté, de ras-le-bol, et surtout d’amour. « Love is Key », une pensée, un mouvement intarissable. Une galerie de portraits, où se greffent les plans furtifs d’une ville de Kingston encore plongée dans une précarité bien présente. Mais là n’est pas la question, car Inna de Yard est une épopée, une transmission de témoin à la jeunesse prête à reprendre le flambeau, qui continuera à pérenniser cet héritage qu’est le reggae.

En bref !

Inna de Yard tend vers le passé glorieux et les deuils passés. Le tragique mixé au succès éphémère. Peter Webber filme une Jamaïque pauvre, mais également un coin de pays somptueux, presque à l’état sauvage. Une image qui colle à la vie de ces artistes légendaires, appelés sur la scène du Trianon de Paris, pour couronner leur amour inconditionnel de la musique, du reggae et surtout de la vie. Un documentaire qui respire la fierté, celle d’appartenir à un mouvement : les témoins et fondateurs d’un art immortel.

09.07.2019

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