A E I O U - L'alphabet rapide de l'amour France, Allemagne 2022 – 104min.

Critique du film

Une relation singulière pour un film confus

Critique du film: Damien Brodard

Présenté au dernier festival de Berlin, le nouveau film de Nicolette Krebitz se perd dans les méandres de sa cérébralité.

Un soir, Anna (Sophie Rois), comédienne berlinoise de soixante ans enchaînant les petits rôles désuets, se fait voler son sac à main par un mystérieux jeune homme. Par un coup du sort, après avoir accepté de donner un cours d’élocution, elle retrouve le dénommé Adrian (Milan Herms) en la personne de son élève. Au fil des leçons, leur complicité grandit tandis que leur relation se complexifie, laissant apparaître des sentiments de part et d’autre.

La réalisatrice allemande Nicolette Krebitz part d’un postulat de départ simple et intrigant : la rencontre inattendue de deux électrons libres que tout oppose et qui, pourtant, vont apprendre à s’apprivoiser. Cette idée donne une première partie de long-métrage attrayante, grâce à une relation de séduction par la transmission de la culture qui pourrait faire penser à celle déjà dépeinte dans Le Liseur (2009), l’adaptation pour le grand écran de l’œuvre de Bernhard Schlink. À ce titre, les séquences d’apprentissage et d’échange entre les deux protagonistes témoignent d’une délicate sensualité véhiculée par la mise en scène. Cependant, une fois passé ces quelques minutes de découverte, le film s’enlise. Non seulement, la caractérisation du personnage d’Anna, tout de même bien interprété par Sophie Rois, la rend très désagréable à suivre, mais les réactions des deux protagonistes quelquefois incompréhensibles les mènent à des situations au mieux ridicules, au pire inintéressantes.

Même s’il est certainement construit comme une ode à la liberté, le scénario finit par se perdre dans une cavale de kleptomanes sortie de nulle part, n’apportant rien de plus au propos, si ce n’est une appréciation encore plus détestable des deux compères. Le principal problème de l’écriture réside sans doute dans le fait d’avoir voulu intellectualiser de nombreux éléments de l’intrigue, notamment par le biais d’une voix hors champ qui rend parfois le tout plus confus qu’il ne l’est déjà. Le film est certainement desservi par ce foisonnement de directions nébuleuses qui, prises indépendamment, demeurent séduisantes, mais dont l’agencement s’apparente plus à une ébauche. Reste le récit sensible d’une relation singulière qui, une fois n’est pas coutume, aurait peut-être mérité une mise en forme plus claire et classique, à l’image de sa mise en scène.

16.01.2023

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