La prisonnière de Bordeaux France 2024 – 108min.

Critique du film

Entre contraste des classes, solitude et sororité

Critique du film: Marine Guillain

Dans sa nouvelle fiction, Patricia Mazuy raconte la naissance d’une amitié improbable entre deux femmes de détenus, incarnées par les parfaites Isabelle Huppert et Hafsia Herzi.

Un gros plan sur des roses, un paquet-cadeau qui tombe au sol, Isabelle Huppert qui sort de chez le fleuriste avec un bouquet presque aussi grand qu'elle... Après cette jolie scène d’introduction musicale au son de la voix rauque de Sarah McCoy, direction la prison. Alma, (Isabelle Huppert) riche bourgeoise, croise Mina (Hafsia Herzi), qui s’est trompée de jour de visite. Comme cette dernière habite loin, Alma lui propose de manger ensemble et de l'héberger jusqu'au lendemain. Immédiatement, le contraste entre la demeure de luxe avec gouvernante où vit Alma et le milieu populaire d'où vient Mina est saisissant.

La première se sent seule dans le faste d’une maison trop grande, attendant sans enthousiasme la sortie de prison de son mari, condamné pour délit de fuite sur un accident de la route qu’il a provoqué avec son amante à côté de lui. La seconde a hérité des galères causées par son homme, liées à une affaire de bijoux volés, et doit gérer seule ses deux jeunes enfants. Deux femmes enfermées dans des vies diamétralement opposées, mais liées par le vide, la solitude, et un besoin viscéral de se libérer. De là, naîtra ainsi confiance mutuelle, complicité, tendresse, dans une amitié complexe et nuancée, mais authentique, défiant toutes les conventions sociales.

Isabelle Huppert (71 ans, plus de cent films à son actif) et Hafsia Herzi (37 ans et une cinquantaine de films derrière elle) forment un duo parfait avec des interprétations très justes, tout en finesse. «Le cinéma, c’est l’art du silence», nous avait lancé la première lors d’une rencontre à Lausanne en avril dernier. Et justement, l’essentiel de leur jeu passe par des regards, des attitudes, des non-dits… qui veulent dire beaucoup. Anecdote cocasse: peu avant «La prisonnière de Bordeaux», ces deux grandes actrices ont tourné ensemble dans «Les Gens d’à côté», d’André Téchiné, drame qui mettait aussi en scène la naissance d’une amitié entre elles. Quant à Patricia Mazuy, avant de passer à la réalisation («Peau de vache», «Bowling Saturne»), elle a fait ses armes avec les plus grand.e.s, puisqu’elle a été stagiaire sur le film «Une chambre en ville» de Jacques Demy puis monteuse pour Agnès Varda («Sans toit ni loi»). Ses collaborations avec la cinéaste se ressentent dans «La prisonnière de Bordeaux», à travers une approche du sujet véritablement réaliste, directe et humaine.

28.08.2024

4

Votre note

Commentaires

Vous devez vous identifier pour déposer vos commentaires.

Login & Enregistrement

geradupo

il y a 1 jour

J’y suis allée pour Hafsia Herzi qui m’a bouleversée dans Le Ravissement et This Teacher. Son jeu est juste dans La Prisonnière, celui d’Huppert aussi, mais le scénario plat et la mise en scène ennuyeuse les desservent.


CineFiliK

il y a 6 jours

“Codétenues”

Alma accueille dans sa grande maison Mina qu’elle ne connaît pas. Les deux femmes si différentes ont pour seul point commun un mari en prison.

Drôle d’endroit pour une rencontre. L’idée de se rapprocher lors d’une visite au parloir paraît plausible. Attente, patience, crainte, colère, frustration et déception sont autant de sentiments partagés capables de créer des liens. Mais l’attitude accueillante d’Alma est peu crédible. Elle s’ennuie, se dit seule, abandonnée, alors qu’une fête inattendue la montre très entourée. L’aspect policier manque également de consistance. Il y avait mieux à faire que de monter ce mauvais coup, vol au-dessous de tout soupçon. Même avec son petit rebondissement temporel, le scénario pourtant écrit à trois têtes ne s’élève guère. C’est dommageable pour ses personnages d’épouses fidèles et bafouées. Deux « codétenues » prisonnières des méfaits de leur conjoint, rêvant d’une échappée belle. Dans le rôle de celle qui vient du bas et de loin, Hafsia Herzi subit davantage qu’en matonne à Borgo. En face, Isabelle Huppert, plus Elle que jamais, s’amuse de son image bourgeoise mêlant extravagance et folie douce. Ce n’est pas des uramakis qu’elle savoure ici après une agression, mais un chou à la fraise qu’elle avale laconiquement en constatant une effraction.

(6/10)Voir plus

Dernière modification il y a 5 jours


Eric2017

il y a 11 jours

Ce film n'est de loin pas un chef d'oeuvre. Toutefois Isabelle Huppert y est attachante. Quant au scénario il ne m'a pas plu du tout. J'ai frisé l'ennui car les dialogues sont sans vies. Dommage. (G-03.09.24)


Autres critiques de films

Beetlejuice Beetlejuice

Deadpool & Wolverine

Un p’tit truc en plus

Moi, Moche et Méchant 4