Sur la plage de Chesil Royaume-Uni 2017 – 110min.
Critique du film
Sur la plage, abandonnée …
Publié en 2007, le best seller de l’écrivain britannique Ian McEwan trouve enfin le chemin des salles obscures. Porté à l’écran par le dramaturge, metteur en scène et nouvellement réalisateur Dominic Cooke, «Sur la plage de Chesil» embarque les talentueux Saisore Ronan et Billy Howle dans une Angleterre qui découvre les Beatles pour une élégante procession sur l’amour, aussi charnel soit-il …
Florence (Saisore Ronan) est une violoniste ambitieuse et vient d’une famille conservatrice de notables. Edward (Billy Howle) est un jeune et brillant étudiant en histoire au foyer plus tumultueux. L’été 1962 à Londres, la révolution Pop est en marche et l'Angleterre est en proie à des changements sociétaux radicaux. Dans l’effervescence des sixties, ils s’aiment et se marient malgré la pression sociale qui sépare leurs deux familles. Les voilà en lune de miel, comme une invitation aux privilèges du couple mais un événement bouleversera leur vie à jamais.
À quelques encablures de ce tombolo désespéré du comté du Dorset (Chesil Beach), les jeunes époux célèbrent, selon la tradition consacrée, leur union dans le décor d’un hôtel bourgeois. Le film s’ouvre dans leur suite où une table a été dressée. Une conversation est entamée, les deux pantins papotent patiemment dans cette orchestration sacralisée du mariage. Le lit nuptial, étouffant de velours et de pourpre, trône dans la pièce comme une tentation irréversible. Ce face à face les amènera à se souvenir de leurs vies passées et offrira un va et vient de flashbacks. Les vies défilent et les époux semblent faire l’expérience de mort (ou d’une intimité) imminente. Prémonitoire, le réalisateur trouve ici le moyen de nous parler des mondes qui éloignent ces deux familles.
Une tragédie en trois actes. Cette confrontation et les flashbacks en composent la première. Elle permet d’opposer l'Angleterre bureaucratique d’antan à une culture plus intellectuelle, libérée et tournée vers la décennie à venir. En filigrane, le scénario compose autour de la lutte des classes, le mariage, le couple, la libération sexuelle et les apophtegmes de l'Angleterre conservatrice. Si le dîner et les souvenirs sont forts de symboliques et admirablement photographiés par Sean Bobbitt (directeur de la photographie), la longueur et le développement insistant des personnages pourra en perturber l’expérience. Mais ils conduisent à l’inévitable et tragique consommation du mariage. Aussi malaisante qu'élégamment interprétée par les deux comédiens (Saisore Ronan & Billy Howle), elle nous amène au deuxième acte sur la plage. Dès lors, Sur la plage de Chesil ouvre les voies à une dramaturgie plus subtile et confronte ses personnages (et le spectateur) à des vertiges étouffants. Si le troisième acte (qui reprend l'histoire des années plus tard) nous submerge, il faudra néanmoins accepter une narration lente et étirée, qui nous bercera avec cynisme dans les méandres d’un drame shakespearien.
En bref ! Que reste-t-il de leur amour ? Sous la direction de Dominic Cooke, Sur la plage de Chesil sera une lourde et longue procession sur la possibilité d’un amour. Extrêmement théâtral, il faudra y voir la patte inspirée du dramaturge. Et si le voyage se révèle inégal, le film trouvera dans sa dernière partie une fatalité foudroyante.
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