Men Royaume-Uni, Etats-Unis 2022 – 100min.

Critique du film

Des hommes de tous les côtés

Critique du film: Teresa Vena

Présenté en séance spéciale à la Quinzaine des réalisateurs du Festival de Cannes 2022 ; «Men» est la nouvelle œuvre du réalisateur britannique Alex Garland. Un règlement de comptes surréaliste sur le thème de la masculinité toxique.

Suite au suicide de son mari, Harper (interprétée par la talentueuse Jessie Buckley, nommée aux Oscars 2022 pour son rôle dans The Lost Daughter) est au bord du gouffre. Pour échapper à son quotidien, Elle s’exile à la campagne, dans une maison au cadre idyllique. Dans le village, elle fait la connaissance des habitants : un groupe d’hommes à l’aspect similaire (tous interprétés par le génial Rory Kinnear, vu dans Mourrir peut attendre). Alors que la jeune femme cherche à prendre ses distances, ils s’imposent avec de plus en plus de violence et commence à la harceler. Harper se sent en danger.

Auteur à l’origine du roman «The Beach», source d’inspiration du long-métrage éponyme signé Danny Boyle en 2000, Alex Garland passe ici pour la troisième fois derrière la caméra, après Ex Machina (2014) et Annihilation (dévoilé sur Netflix en 2018). «Men» illustre de façon particulièrement évocatrice et pessimiste le thème de la masculinité toxique, avec une vision dystopique et alarmiste de la société. En effet, dans cet environnement oppressant, personne ne semble pouvoir sortir vainqueur de cette lutte des genres.

Dans la première partie du film, une abondante répétition de flashback aux tonalités rougeâtres offre une vision de la relation compliquée qui liait Harper et son mari James (Paapa Essiedu, vu dans l’excellente série «I may destroy you»). L’utilisation originale du «body horror», sous-genre horrifique basé sur des transformations graphiques ou psychologiquement du corps, permet une admirable gestion des tensions. Mais, si l’esthétique et la photographie de Rob Hardy est excellente, son utilisation, fortement métaphorique, et son lien avec l’intrigue restent peu compréhensibles.

«Men» charme par ses images, son esthétique et l’originalité de ses idées. Le long métrage finit par s’éloigner du genre horrifique pour nous offrir un récit dystopique. Malheureusement, un scénario maladroit et un suspens manquant peine à convaincre.

(Festival de Cannes 2022)

Traduit de l’allemand.

04.07.2022

3

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Commentaires

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CineFiliK

il y a 2 ans

« Tous les mêmes »

A la suite d’une séparation tragique, Harper quitte Londres pour se ressourcer dans la campagne anglaise. Elle loue une maison imposante au milieu de nulle part. Dans cet environnement réconfortant rôde une présence inquiétante.

Il y a l’image, belle et travaillée. Les couleurs éclatantes, symboliques : rouge comme le sang, vert forestier apaisant, robe rose féminine et noir intense amplifiant la terreur. Le son participe aussi grandement à l’expérience : bruits de la nature, écho musical, chants religieux déformés ou silences de la nuit. De quoi faire monter l’angoisse. Alex Garland, qui avait séduit avec Ex machina, est un esthète et tient à le montrer. A force, il use et abuse d’effets qui alourdissent son propos. Alice au pays des monstres ou Eve chassée dans l’Eden, Harper traverse le tunnel, miroir déformé d’une réalité. Autour d’elle, les hommes, qu’ils soient mari, péquenaud, vagabond, pubère ou prêtre, révèlent une seule et même nature, un visage unique et menaçant. Porter les valises, demander si elle est accompagnée, offrir un verre ou poser une main sur un genou construisent, l’air de rien, un sentiment de domination toxique. Dans un final choc, grotesque et fascinant, le mâle engendre littéralement le mal. Face à lui, la femme est une tentatrice fragile et pécheresse, coupable d’avoir croqué la pomme. Ce discours radical et caricatural crée le malaise tout en suscitant l’interrogation : une réconciliation est-elle possible ou la tranchée à marquer à la hache ?

(6.5/10)Voir plus

Dernière modification il y a 2 ans


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