Critique du film
Norma Jeane, la femme derrière Marilyn
De nombreuses années après le début de sa production et quelques débats dus à son contenu explicite, le film événement de la 79e Mostra de Venise, acquis par Netflix, est enfin dévoilé. Andrew Dominik livre une œuvre audacieuse dans laquelle resplendit Ana de Armas.
Un portrait fictif de la vie tumultueuse de Norma Jeane Baker (Ana de Armas), connue de tous sous le nom de Marilyn Monroe. De son enfance difficile aux plateaux de tournage hollywoodiens, Norma Jeane vivote de relations amoureuses contrariées en répercussions dramatiques, se sentant chaque jour plus oppressée. La jeune femme est tragiquement tiraillée entre sa propre volonté et l’image sulfureuse renvoyée par son alter-ego iconique.
C’est un projet de longue haleine auquel le réalisateur Andrew Dominik met un terme avec brio. En adaptant le roman éponyme de Joyce Carol Oates, ses intentions sont claires : il n’est pas question de tourner un documentaire ou une succession de faits réels. À l’image d’un Amadeus (1984) ou plus récemment d’un Spencer (2022), Dominik aborde la figure de Marilyn Monroe par la fiction afin de capter un état d’esprit, étudier le ressenti d’un personnage. Le scénario a donc pour originalité de se placer du point de vue de Norma Jeane, le véritable nom de l’actrice, et de faire de Marilyn une entité presque à part entière, mais partageant pourtant le même corps. En explorant les côtés les plus sombres d’Hollywood, des viols à l’exhibition du corps des femmes comme objets de désir, la plongée dans la psyché de l’icône est à la fois tragique et très crue. Un récit sans concession qui n’épargne pas le public.
Pour s’immiscer dans les yeux de Norma Jeane, la réalisation de Dominik déploie de nombreux outils, tous visant à traduire l’enfermement et le désespoir d’une femme broyée par le système et victime de son succès. En outre, le metteur en scène s’offre le luxe d’alterner à volonté les formats de cadre et de passer de la couleur au noir et blanc, par ailleurs sublime. En dépit de la beauté purement technique, la pertinence de ces changements incessants reste toutefois à justifier. En outre, il faut évidemment louer l’actrice cubaine Ana de Armas qui décroche enfin un grand rôle et se fond parfaitement à la formidable direction artistique. Il est moins question de son imitation très convaincante que de sa capacité à s’accorder à l’intensité et à l’onirisme du film. Une grande performance qui la mènera sans nul doute aux précieux Oscars. D’une maîtrise technique folle renforcée par une écriture acerbe, Blonde risque toutefois de diviser en raison sa nature parfois provocante et rude, mais marquera grâce à sa bouleversante interprète et à de grands moments de cinéma… sur petit écran.
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Commentaires
“Hellywood”
Seule avec sa mère, la petite Norma Jean reçoit pour son septième anniversaire une photo de son père. Une absence qui la hantera jusqu’à la fin de sa vie.
En 1933, des incendies meurtriers ravagent la Californie. Les lettres blanches de la ville sont à la merci des flammes. Entrainant avec elle, en pleine nuit, sa fillette, l’instable Gladys souhaite voir l’enfer de plus près et en « avant-première ». La Cité des Anges brûle et consumera bientôt l’étoile Monroe.
Sous l’œil d’Andrew Dominik, la vie de Marilyn a tout d’un cauchemar éveillé. Enfance malheureuse et carrière maudite malgré le rêve hollywoodien qu’elle inspire. « Je ne suis pas une star, je ne suis qu’une blonde », déclare celle qui dissimule son intelligence. Aux yeux des autres, l’actrice n’est qu’un corps sexué et décérébré à conquérir. Abusée par tous, elle subit les regards inquisiteurs des spectateurs, avides et pervers des producteurs. En quête perpétuelle d’une figure paternelle, elle en vient à appeler « daddy » ses maris ou amants volages à qui son cœur appartient.
Dans l’imitation quasi totale, Ana de Armas minaude et pleurniche beaucoup, mais s’en sort sans déshonneur. Ecran carré que l’on étend au besoin, noir et blanc ou scènes colorées, transitions imagées parfois maladroites quand les étoiles deviennent spermatozoïdes… Le film joue sur le kitsch pour aborder le mythe. On aurait aimé qu’il s’attarde aussi sur d’autres talents de Marilyn que son rôle principal de victime.
(5.5/10)… Voir plus
Dernière modification il y a 2 ans
Andrew Dominik peint un portrait cru et choquant de l'actrice. Ana de Armas délivre une prestation époustouflante. Un film incroyable que les amateurs de blockbusters risquent de détester. Dommage qu'il ne sorte pas en salle.
4.5/5
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