Woman at War France, Islande, Ukraine 2018 – 101min.
Critique du film
Une fable écologique burlesque et tendue
Halla, la cinquantaine, déclare la guerre à l’industrie locale de l’aluminium, qui défigure son pays. Elle prend tous les risques pour protéger les Hautes Terres d’Islande jusqu’au jour où l’arrivée inattendue d’une petite orpheline dans sa vie va tout changer.
Grâce à sa ribambelle d’auteurs intrigants, le cinéma nordique est sans doute l’un des plus passionnants de ces dernières années: Les Danois Lars Von Trier, Thomas Vinterberg et Nicolas Winding Refn, les Suédois Roy Andersson et Ruben Ostlund ou encore le Norvégien Joachim Trier. Parmi eux, s’ajoute incontestablement l’Islandais Benedikt Erlingsson. Après l’OFNI Des chevaux et des hommes, son nouveau long-métrage A Woman at War, présenté et récompensé à la Semaine de la critique lors du dernier Festival de Cannes, est un film aussi sensible que burlesque.
Comme présenté à travers son pitch, Woman at War entremêle deux histoires centrées autour d’une seule et même personne : l’héroïne Halla. D’un côté, le scénario raconte la lutte de cette quinquagénaire rebelle militante écologique et prête à tout pour sauver l’âme naturelle de son pays en voie d’industrialisation. De l’autre, il narre la vie quotidienne de cette professeure de chant, adepte du yoga (sa sœur jumelle lui enseigne), et sur le point de devenir maman lorsque sa demande d’adoption aboutit enfin après quatre ans d’attente.
Globalement, le déroulé de Woman at War est des plus classiques. La narration est linéaire, rien ne vient entrecouper l’intrigue et le dernier acte semble écrit d’avance. Le récit a beau être très ordinaire, il surprend énormément grâce à la mise en scène particulièrement inventive de son réalisateur. Benedikt Erlingsson, qui avait déjà épaté avec son étrange Des chevaux et des hommes il y a quatre ans, prouve une nouvelle fois son audace.
Le réalisateur mêle comédie noire, froide et cynique à un suspense précis et torturé. La comédie absurde se révèle être également une fable politique, humaniste et engagée. Enfin, le cinéaste islandais surprend grâce à l’ingénieuse idée d’intégrer un trio de musiciens, ou de chanteuses folkloriques, à son récit. La partition musicale qui façonne l’ensemble est donc jouée à l’image et elle est souvent amenée de manière absurde, proposant de nombreuses situations rocambolesques (le groupe sur un toit, les chanteuses au bord d’une rivière).
En plus de cette originalité, Woman at War bénéficie d’une sublime photographie, magnifiant les immenses plaines islandaises, successivement brumeuses et ensoleillées. De quoi mettre dans les meilleures dispositions son actrice principale Halldóra Geirharõsdóttir, incarnation parfaite de la voisine banale le jour et de l’insoumise révoltée la nuit.
En Bref! Woman at War est une sublime fable politique et écologique, à la fois tendue et burlesque, comique et tragique. Et au-delà de la mise en scène inventive de son réalisateur, le film islandais est surtout porté par sa formidable actrice principale.
Votre note
Commentaires
Super bien mené, le film permet également de se souvenir, pour celles et ceux qui ont eu la chance de pouvoir y aller, des beautés islandaises.
Le plus qui m'a donné le plus la pêche depuis très longtemps!
Seules au monde
Islande: Halla, une quinquagénaire professeur de yoga et directrice d'un chœur, est dans le collimateur de forces de l'ordre islandaises: opposée au financement du réseau électrique de l'île par une multinationale chinoise, elle saborde les lignes à haute tension et provoque un raz-de marée politique. L'adoption d'une petite ukrainienne de 4 ans, Nika, pourra-t-elle adoucir le combat de cette battante dont la sœur jumelle, sur le point de partir en Inde, pourrait mettre en péril.
Le voici donc ce film qui "électrisât la Croisette" avec une trame rappelant 3 Billboards et un combat a-priori similaire contre des moulins.
Sauf que plus au nord, dans une contrée à la fois féerique pour explorer mais cauchemardesque pour y vivre, Halla va, un peu comme Katniss Everdeen, mener une sorte de Hunger Game face au tyrans économiques.
Erlingsson nous propose une véritable satire sur les politiques d'une part, notamment les corrompus, mais surtout nous offre une musicalité exceptionnelle. Et autant, l'on serait tenté, en étant sage, de penser que Halla est une vraie sauvageonne, autant sa décision finale nous la rendent bouleversante, formidablement interprétée par Halldora Geirharossdotir (elle mérite l'effort par sa performance).
Il y a également un message humain très fort sur la migration: celle d'une part d'êtres humains fuyant l'horreur et se retrouvant apatrides, mais surtout celle de la conviction.
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